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Séminaire européen & Conversations avec Daaji – 9ème partie

Octobre 2017, Kanha Shanti Vanam
Mercredi 25 octobre, matin

 

Maxime 5

Les jours suivants, Daaji a continué à recevoir les européens et à échanger avec eux, de façon formelle et informelle.

Le mercredi matin, il a conduit la méditation de groupe à 9h et, après avoir écrit dans son journal, il a commencé par dire: «Je suis heureux qu’il y ait presque 35 nouveaux précepteurs préparés par notre Grand Maître au cours de la session de ce jour». Puis, il a débuté son discours sur la cinquième maxime.

«Soyez toujours authentique, prenez les souffrances comme des
bénédictions divines pour votre propre bien et soyez-en reconnaissant.»

«La traduction précédente de la cinquième maxime était ‘Soyez authentique’ mais la première révision depuis 1947 a été faite en 2014, par un traducteur professionnel qui a dit: ‘Babuji ne dit pas juste ‘Soyez authentique’, il dit: ‘Soyez toujours authentique’. Cela en change l’intensité.’

Puis Daaji a lu à haute voix le commentaire de Babuji, suivi de quelques réflexions: «À première vue, cela a l’air tellement controversé ou paradoxal: accepter les souffrances et en être reconnaissant, dans la pensée qu’elles sont des bénédictions divines. Pourquoi quelqu’un qui vit l’enfer, dirait-il: ‘Oh mon Dieu, merci pour cet enfer’? Peut-être seules les flammes de l’enfer peuvent-elles nous purifier assez pour atteindre le but. Qui sait!

Mais l’amoureux qui vit cela, ne pensera jamais que c’est une souffrance. Même lorsqu’une telle personne souffre, il n’aura pas conscience de la souffrance. Il n’aura aucune idée des flammes sous-jacentes. Il les savourera et poursuivra sa route. Lorsque nous devons sans cesse nous rappeler de prendre les souffrances pour des bénédictions, de les apprécier comme des bénédictions divines, ce ne sont plus des bénédictions parce que nous sommes déjà conscient de la souffrance. Vous comprenez? Lorsque la douleur est là et que nous essayons de la convertir en bénédiction par la force, coûte que coûte, c’est un défi pour le mental humain ordinaire. Nous sommes tous des gens ordinaires.»

 

Exposez-vous à la Réalité intérieure

«Une autre chose qui me fait rire est cet énoncé: «Soyez toujours authentique». Pourquoi diriez-vous à un homme qui dit la vérité d’être toujours authentique? Peut-être parce que c’est un menteur. Le mensonge est quelque part caché ou tapi dans le cœur. Ce n’est que lorsque l’intention de mentir est là, qu’il a besoin qu’on lui rappelle d’être toujours authentique.

Ce matin je discutais avec une sœur de la notion de compassion, d’empathie, etc. Ces qualités sont superbes, mais les rechercher et les cultiver extérieurement, mentalement, consciemment pour vous en parer, c’est trop superficiel. Aucun arbre, aucun bébé ne peut croître de l’extérieur. Ils croissent de l’intérieur, organiquement. Imaginez un arbre sur lequel vous devez mettre une mangue ici, une fleur là, en supplément! Ainsi, rajouter superficiellement des qualités ne nous aide en rien. Être authentique est super, mais pourquoi cultiver cette qualité consciemment au lieu de laisser se manifester de l’intérieur la vérité, la compassion, de leur propre chef? Nous les laissons se manifester parce que c’est notre nature. Mieux vaut ne pas interférer avec elle; ce n’est que consciemment que nous pouvons l’en empêcher.

Une fois que vous en devenez pleinement conscient, cela veut dire que vous avez perdu une connexion quelque part. Vous pouvez réajuster tout cela, mais c’est encore un effort dans la mauvaise direction. La bonne approche est de vous exposer à la Réalité intérieure, d’être un avec elle, immergé dans cet état intérieur. Et lorsque vous êtes en osmose avec votre état intérieur, tout le reste se produit naturellement sans faire d’efforts exagérés, qui ne sont pas naturels. Lorsqu’on laisse la nature intérieure se manifester au dehors, toutes les grandes qualités se révèlent toutes seules.

Lorsque nous parlons d’authenticité à un enfant, qui ne comprend même pas ce que sont les mensonges, nous instillons de mauvaises graines. Peut-être dira-t-il à un certain moment: ‘Peut-être que je peux aussi dire un mensonge car c’est la raison pour laquelle ma maman m’apprend à dire la vérité!’ Eh bien, voilà une argumentation logique.»

 

Les lois de Newton

«Nous pouvons aussi considérer cela de façon tout à fait différente; la réalité peut-elle se dévoiler à un menteur? Est-ce la raison pour laquelle je dois être authentique? Et les mensonges ont leurs propres pistes. Vous connaissez la première loi d’inertie de Newton: tout corps en mouvement reste en mouvement à moins et jusqu’à ce qu’une force extérieure lui soit appliquée, soit pour changer le cours de ce mouvement ou pour l’arrêter. Ou un corps reste au repos à moins que vous ne le poussiez ou le déplaciez. Un menteur reste toujours sur le sentier du mensonge à moins que ne se produise une prise de conscience et qu’il se mette à dire la vérité. Mais, afin de dire continuellement la vérité, vous n’avez besoin d’aucune force, aussi la loi de Newton échoue-t-elle dans le domaine de la spiritualité ou en ce qui concerne la moralité.

Reprenons une des lois de Newton, où il dit qu’actions et réactions sont égales et opposées en direction, mais dans la spiritualité et le monde émotionnel, cela ne s’applique pas aussi bien. Cela ne se produit que dans le domaine physique. Supposez que vous soyez quelque peu irrité contre quelqu’un – en général votre conjoint! Contre qui d’autre allez-vous vous mettre en colère? En fait, c’est une excuse; c’est notre faiblesse! Avec un brin de colère, un brin d’irritation, voyez l’impact que cela a sur votre conjoint pour la journée entière. Ou bien pensez à vos jeunes années, quand une fille assise à côté de vous vous regarde très affectueusement et que vous en pincez pour elle pendant des mois! Vous lui écrivez sans cesse, vous pensez tout le temps à elle et vous voulez lui apporter une rose, mais il vous faut réfléchir un million de fois à la façon de lui offrir cette rose. Juste un petit coup d’œil crée dans votre cœur un tremblement de terre qui dure pour toujours.

En spiritualité, les réactions se manifestent de façon différente; pas de la façon dont elles se manifestent dans le domaine physique. Je pense que les mensonges et autres méfaits se manifestent de la même façon que les événements qui surviennent dans le monde physique. Ils ont un caractère perpétuel, si bien que la loi de Newton s’applique dans leur cas. Mais pour diffuser l’authenticité, vous n’avez pas besoin de faire des efforts et vous n’avez pas besoin de force externe. Pour aimer quelqu’un vous n’avez pas besoin de faire d’efforts, tandis que pour détester quelqu’un, vous devez y réfléchir. Pour faire ce qui est bien, vous n’avez pas besoin de faire d’efforts; pour mal agir vous devez faire des efforts.

Mon Maître exprimait toujours cet aspect de la sagesse basée sur le cœur. Dire la vérité, dire que «je suis Kamlesh» ne requiert aucun effort, tandis que concocter des mensonges consomme beaucoup d’énergie et continuer sur la voie du mensonge demande encore plus d’énergie. C’est sans fin.»

 

 

À quoi mènent les mensonges?

«Je vais vous raconter une histoire drôle sur la façon dont prévalent la logique, la justice et l’authenticité. Il s’agit d’un voleur qui a volé de l’argent chez un homme riche. Il s’est ensuite rendu dans un magasin et s’est mis à dépenser l’argent.

Il s’est fait prendre parce que le marchand a téléphoné à la police pour dire: ‘Il a des faux billets.’

Amené devant le juge il a argumenté: ‘Votre Honneur, si j’avais su que c’était des faux billets, croyez-vous que je les aurais volés?’

Belle logique, non?

Alors le juge a dit: ‘Oui, je suis d’accord avec vous, vous n’auriez pas volé si vous l’aviez su.’

‘Alors, comment pouvez-vous m’inculper pour avoir volé des faux billets?’

a-t-il demandé.

‘D’accord, je ne vous inculperai pas pour avoir volé de faux billets, mais je vais vous inculper pour vol simple.’

Deux jours après, il a de nouveau été amené au tribunal pour vol et le juge a encore voulu le condamner.

Il a dit: ‘Non, votre Honneur, vous ne pouvez pas me condamner parce que c’était le vol d’une monnaie sans valeur. Ce sont de faux billets, alors comment pouvez-vous m’inculper pour avoir volé une monnaie sans valeur?’

Ainsi, les mensonges et autres méfaits peuvent logiquement amener à un esprit malhonnête. Lorsque l’authenticité est là, comme l’exprime Babuji avec beaucoup de simplicité: ‘C’est comme c’est’, comment pouvez-vous davantage décrire la réalité?»

 

L’état final

«Et lorsqu’on en vient à la Réalité finale, Babuji dit ici dans la cinquième maxime:

‘Nous cultivons l’habitude de l’authenticité afin que nos actions et nos comportements puissent s’accorder avec l’état décrit ci-dessus, tout comme c’est le cas dans les comportements de la Nature.’

Il dit ensuite qu’il est impossible de décrire cet état final de la Réalité, car aucun mot ne peut l’exprimer.

Nous voulons toujours comparer les choses pour les décrire, mais il n’y a rien dans l’univers d’aussi parfait que la Réalité intérieure. C’est pourquoi il est dit dans les Upanishads: ‘Neti, neti, neti’ ce qui signifie ‘Pas ceci, pas ceci, pas ceci.’ Babuji la présente sous un angle positif en ces termes  ‘C’est ce que c’est; c’est comme c’est; ainsi soit-il.’ Faîtes-en juste l’expérience et poursuivez.

Si vous aimez tellement Dieu, peu importe vraiment ce qui se passe dans votre vie; il n’y a ni temps ni place pour l’analyse. Il n’y a pas besoin d’analyser si ce que vous vivez est bon ou mauvais. Devez-vous même penser que c’est une bénédiction ou un cadeau céleste venu d’en-haut? Non. Dans cet abandon absolu, quand l’amour est là, il n’y a plus d’introspection.»

 

L’importance de l’acceptation

«Penchons-nous un peu plus sur cet aspect de l’acceptation de souffrances ou de situations défavorables. Babuji nous demande: lorsque vous pensez que quelque chose est défavorable, que faire? Vous n’avez pas une condition suffisamment bonne pour réussir à ne pas remarquer les souffrances, alors que faire ensuite, une fois que vous en prenez conscience? Acceptez-les! Il n’y a que deux possibilités: accepter ou rejeter. Disons que vous les rejetez, vont-elles disparaître? Elles ne vont pas disparaître simplement en souhaitant qu’elles le fassent. Ce n’est que lorsque vous acceptez et que vous continuez à avancer que cela devient plus facile. Ce n’est pas que la souffrance va s’en aller, mais lorsque vous l’acceptez, quelque chose de nouveau émerge de l’intérieur.

Une fois que vous acceptez un obstacle ou une situation défavorable, ce qui émerge en premier est que vous commencez à vous préparer à le surmonter et vous vous fortifiez dans ce processus. Ensuite, vous apprenez une leçon: ‘Je subis cette souffrance parce que…’ Vous commencez à analyser: ‘Je n’aurais pas dû faire telle chose. J’aurais plutôt dû faire autrement.’ Ainsi, cela nous rend plus sage, meilleur. Cela n’est possible que lorsque nous acceptons les choses. Si nous ne les acceptons pas, nous allons encore souffrir mais nous n’en apprendrons rien, nous ne deviendrons pas plus sage, de plus les choses ne changeront pas.

Il y a en Inde des yogis ou sadhus qui vont jusqu’à l’autre extrême; au lieu d’accepter les souffrances ils les sollicitent. Dans quel but? Même dans d’autres traditions, telles que les anciennes traditions chrétiennes, j’ai entendu dire qu’ils marchaient avec des clous dans leurs chaussures, ou qu’ils se flagellaient le dos jusqu’au sang et que celui qui se flagellait le plus était considéré comme le plus fervent. C’est vrai?»

[Le public: Oui]

«D’accord.

Ainsi, dans cette maxime, il ne s’agit pas de se torturer. Nous n’avons pas besoin de solliciter les souffrances – nous avons assez d’ennuis dans la vie comme cela. Acceptez-les simplement comme elles viennent et quand elles viennent, mais ne les sollicitez pas. Là aussi nous devenons plus sage. Lorsque nous disons: ‘Mon Dieu, je vous prie de m’envoyer des souffrances pour que je m’améliore, pour que je puisse vous exprimer ma gratitude, pour que je puisse faire étalage de ma force à résister à la douleur,’ c’est encore l’ego qui entre en scène. Nous voulons faire admirer notre capacité de souffrir. Et quand vient l’ego, peu importe comment il vient. À présent il se manifeste de façon négative, sous un aspect différent: ‘Je peux souffrir’ ou ‘Je peux y prendre plaisir.’ En fait, nous ne devrions rien demander. Laissez venir; si cela vient, soyez prêt tout simplement.

J’ai noté autre chose sur ce que l’on apprend des tornades et des ouragans. Dans une tornade, l’endroit le plus sûr est le centre, l’œil de la tornade ou de l’ouragan.

À la périphérie, elle fait des ravages, mais au centre c’est en fait extrêmement calme. Dans votre vie également, vous n’avez pas besoin de faire tellement attention à tous ces ennuis au niveau physique, au niveau mental, au niveau de l’ego, au niveau du corps subtil. Comment détourner cette attention? En allant dans le lieu le plus central, allez plus en profondeur dans votre cœur, allez dans la profondeur la plus intime de votre cœur. J’aimerais que cela puisse se faire à la demande: ‘D’accord, je vais aller au douzième point, permettez-moi d’y séjourner.’

J’aimerais que nous soyons tous capables de faire cela, mais c’est possible – un peu de pratique, un peu d’engagement nous y emmènera.»

 

L’acceptation, un antidote de l’ego

«J’aime beaucoup cette note. Disons que nous avons à la maison une discussion avec nos enfants ou avec notre conjoint. Il y a des fois où les choses prennent une tournure risquée, et lorsque l’autre est incapable d’accepter, nous le ou la cataloguons: ‘Oh, il est si égotique!’ Nous associons donc la non-acceptation à l’ego: il ou elle est incapable d’accepter parce qu’il ou elle est si égotique. L’individualité s’épanouit intensément alors qu’on donne tellement d’importance à la liberté individuelle, et ensuite, il n’y a plus d’harmonie possible. Si l’individualité est au prix de l’autre, alors elle empire. Dans une parfaite unité, il n’y a pas de blessure venant de l’ego. Dans cette unité, l’égoïsme se dissoudra. En l’absence d’unité, disons, il peut y avoir deux ou trois fortes personnalités qui prédominent. Où que soit la force, ils ne se rejoindront jamais. Bien que chacun d’eux puisse être très intelligent, la force de leurs idées les séparera.

Mais, dès l’instant où nous respectons les idées et les opinions des autres et que nous les honorons, alors les multiples différences que nous avons tous, peuvent se rejoindre, ce qui ne fera qu’enrichir les choses bien qu’elles soient différentes. Et nous ne pouvons que respecter et exploiter nos talents mutuels, nos opinions et idées différentes lorsque l’ego est maîtrisé dans une large mesure. Les deux et les trois sont ‘multi’ et tout ce conflit surgit lorsque les egos s’affrontent dans le ‘multivers’. Il n’y a de possibilité d’unification que lorsque nous nous admirons l’un l’autre véritablement, de manière authentique. Ainsi, nous pouvons dire que l’acceptation est en général un antidote à l’ego. Je fais attention de dire ‘en général’, parce qu’il se peut qu’il y ait une exception.»

 

Les Maîtres

«Cette dernière note concerne nos Maîtres; en fait les deux Maîtres, Babuji et Chariji, que je n’ai connus qu’un petit peu. Je n’ai lu que les écrits de Lalaji, notre Adiguru, mais ils ont tous partagé la même chose. Voici quelque chose qui a surgi spontanément dans mon cœur, aussi l’ai-je noté:

Simple dans tous les sens du terme,
Pur dans tous les sens du terme,
Désintéressé dans chaque geste,
Bienveillant dans chaque action,
Toujours souriant et bienheureux,
Pourtant mon Bien-aimé, mon «tout-en-tout», mon tout,
A souffert tout le temps.

Un si merveilleux paradoxe de bénédictions et de souffrances. Merci. Avec ceci, nous terminons la cinquième maxime.»

 

À suivre…

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